Hi! PARIS : un pôle d’excellence pour faire de la France un leader de l’IA
Depuis sa création par l’Institut polytechnique de Paris et HEC Paris, Hi! PARIS s’est hissé au rang de centre de recherche de premier plan sur l’intelligence artificielle (IA). Soutenue depuis 2022 par VINCI, la structure tisse des liens précieux entre chercheurs, étudiants et entreprises – avec, en toile de fond, un enjeu majeur : la souveraineté française en matière d’IA. Entretien sur ce pôle d’excellence avec Gaël Richard, directeur scientifique de Hi! PARIS, Bruno Daunay, directeur du programme IA de Leonard et membre du comité de pilotage opérationnel de Hi ! Paris, et Olga Chidlovsky, responsable mécénat et partenariats chez VINCI.
Comment est né Hi! PARIS et quelle est sa vocation ?
Gaël Richard – Tout est parti d’un constat : l’IA constitue une révolution technologique qui transformera tous les domaines de l’économie et de la société. Pour des établissements d’enseignement supérieur et de recherche, impossible de passer à côté ! Les écoles de l’Institut polytechnique [qui regroupe l’École polytechnique, l’École nationale des ponts et chaussées, Télécom Paris, Télécom SudParis, l’ENSTA, et l’ENSAE Paris, NDLR] comptaient déjà plusieurs équipes de renommée mondiale travaillant sur différents aspects de l’IA. Nous avons souhaité les rassembler au sein d’un centre capable de devenir une destination de choix en matière d’innovation, d’enseignement et de recherche sur l’IA et de rivaliser avec le MILA à Montréal ou HAI à Stanford. Forts de nos liens historiques avec le monde économique, nous nous sommes tournés vers de grands groupes français disposant de centres de R&D afin d’obtenir un soutien financier. C’est ainsi que Hi! PARIS a vu le jour grâce à des financements provenant de mécènes privés, aujourd’hui au nombre de cinq : VINCI, L’Oréal, Capgemini, Total Energies et Schneider Electric. Ce soutien nous a permis de recruter de nouveaux professeurs d’envergure internationale et d’être très rapidement reconnus dans le domaine.
Au-delà de ce soutien financier, quelle valeur ajoutée les entreprises mécènes apportent-elles à l’écosystème Hi! PARIS ?
Bruno Daunay – Pour les étudiants, il est essentiel de disposer d’un ancrage dans le monde réel. VINCI et les autres mécènes sont là pour partager leurs cas d’usage et leurs données, afin que les laboratoires s’exercent dessus et que les étudiants bénéficient de nos connaissances. En bref, il s’agit de cultiver les échanges entre une sphère académique de très haut niveau qui travaille sur des sujets peu opérationnels et nous, entreprises, qui avons un besoin concret d’application de ces modèles. C’est la logique qui sous-tend les différents temps forts de Hi! PARIS.
Fin août 2025, le centre a organisé un « data bootcamp » de deux semaines, durant lequel les futurs étudiants de Master 2 ont reçu une formation sur la donnée. La partie théorique, assurée par des professeurs, se complète d’une formation appliquée à des cas d’usage concrets, dispensée, elle, par des opérationnels issus des entreprises mécènes. De la même façon, chaque automne se déroule un hackathon lors duquel 300 étudiants de master travaillent sur un sujet intéressant les mécènes et pour lequel ils peuvent fournir un jeu de données. Deux autres exemples illustrent la façon dont Hi! PARIS favorise les liens des chercheurs et des étudiants avec le monde de l’entreprise : les projets « capstone », où, durant trois mois, des étudiants sont détachés pour travailler sur des sujets proposés par les mécènes et encadrés par des opérationnels, et la Hi! PARIS Summer School, une semaine de cours de très haut niveau, à laquelle assistent des opérationnels et data scientists des entreprises mécènes, et qui leur permet de maintenir leurs connaissances à jour. Des « meet-up » entre mécènes et Hi ! Paris sont enfin organisés afin que chacun puisse discuter de façon privilégiée avec des chercheurs sur des sujets qui les intéressent et pourquoi pas imaginer des thèses ou des post-doctorats
Quels sont les avantages de ce partenariat pour les entreprises mécènes et notamment pour VINCI ?
Bruno Daunay – Chez VINCI, l’IA était encore un sujet émergent en 2022, lorsque nous sommes devenus mécènes de Hi! PARIS. À l’époque, nous redoutions de manquer de compétences dans ce domaine complexe. Dans ce contexte, avoir la possibilité de nous associer à un écosystème de recherche et, partant, de nous appuyer sur des chercheurs, doctorants ou post-doctorants était extrêmement précieux.
Olga Chidlovsky : Pour VINCI, il s’agissait effectivement de mieux conjuguer la technicité de nos ingénieurs avec les apports de la recherche. Aujourd’hui, les enjeux sont si complexes qu’un savoir-faire technique opérationnel ne suffit plus ; la recherche est indispensable. Par ailleurs, ce partenariat s’inscrit dans la volonté de VINCI de diversifier les expertises des femmes et hommes qui font et feront VINCI. Et pour rencontrer des profils différents, en l’occurrence des chercheurs de pointe en IA, Hi! PARIS est un terreau formidable !
Gaël Richard – En effet, pour les entreprises mécènes, l’un des grands intérêts de Hi! PARIS réside dans la possibilité de rencontrer des talents pour, à terme, potentiellement les recruter. Par ailleurs, mettre en place des projets collaboratifs plus ciblés, tels que des thèses Cifre, peut aussi aider les entreprises à monter en compétence sur des axes de recherche pertinents pour elles. Enfin, ce partenariat permet aux mécènes de recruter des talents externes en faisant valoir leurs contacts directs avec le monde de la recherche ; c’est un atout notable pour attirer des ingénieurs ou chercheurs intéressés par le monde académique, où l’on manque parfois de cas d’usage.
En quoi des initiatives comme Hi! PARIS relèvent-elles aussi de l’intérêt général ?
Gaël Richard – Au cœur de Hi! PARIS, il n’y a pas seulement la question de l’impact de l’IA sur la technologie, mais aussi sur la société dans son ensemble, du travail à la justice en passant par l’éducation. C’est donc un enjeu sociétal majeur. Mais pour la France, disposer de centres comme Hi! PARIS est aussi une question de souveraineté : nous avons besoin de champions nationaux afin de ne pas dépendre d’acteurs américains ou asiatiques pour notre accès à l’IA. Pour autant, l’excellence en matière de formation ne suffit pas, puisqu’on ne peut se satisfaire de voir nos talents recrutés par des entreprises américaines ou chinoises. De la même façon, notre expertise ne peut se limiter à la recherche, dont les fruits profitent aussi aux entreprises étrangères. Voilà pourquoi la France doit devenir un leader de l’IA tant en formation qu’en innovation et en recherche, grâce à des centres de niveau mondial localisés au plus près de l’écosystème économique. Et nous avons tous les moyens d’y parvenir : Paris est déjà une destination en IA, notamment grâce aux solides capacités mathématiques de nos étudiants et chercheurs. La France est donc légitime et crédible pour devenir une destination mondiale en matière d’IA, mais aussi pour construire une IA responsable et éthique. Car si cette technologie est un formidable outil, elle peut aussi devenir une faiblesse voire une menace si nous la laissons entre les mains d’autres puissances. Voilà pourquoi être excellents dans ce domaine sera une force pour nos entreprises et nos institutions de recherche mais aussi, plus largement, pour notre pays.
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